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permettre aux plus pauvres de retrouver leur dignité

La rencontre des plus pauvres

La première exigence est de considérer les plus fragiles, comme des hommes et des femmes à parte entière. Les réponses politiques, sociales, psychologiques, pédagogique, éducatives sont nécessaires, certes, mais pas suffisantes… Le drame de la misère dépasse de loin les erreurs techniques de la démocratie, les mauvais fonctionnements de nos sociétés ou bien les questions d’inégalités ou les questions éthiques. La misère, c’est le rappel que nous avons besoin d’être aimés par un autre, par les autres; c’est le premier lieu de l’identité humaine.

La seconde exigence que posent les plus fragiles est d’être reçu dans leur globalité. L’être humain que nous rencontrons, même s’il a tout perdu, s’il est seul, sans argent, sans domicile, sans travail reste un ETRE AVEC… La personne que nous rencontrons a eu des parents, des frères et sœurs, un mari ou un compagnon, une épouse ou une compagne. Il a eu peut-être des enfants, des neveux et nièces, des cousins-cousines. Il est rare que les plus fragiles soient complètement sans relations.

Nous sommes toujours sidérés par la blessure que représente le fait de ne pas avoir connu ses parents et de les rechercher, même à un âge avancé, ou bien par la blessure des enfants placés, ou adoptés que les parents ne retrouvent jamais.

Et s’ils n’ont plus de famille, ils ont cependant des relations, des amis, des voisins. Joseph Wrésinsky disait que « les pauvres n’attendent pas de nous une parole, ni même une action. Ils attendent une présence et même un silence». Nous croyons les connaître, mais nous ne les connaissons pas et d’une certaine manière c’est leur chance… Il y a des circuits; c’est souvent une économie de survie, de misère, mais elle existe quand même; si on supprimait l’économie parallèle dans les cités, les gens mourraient de faim.

La troisième exigence est celle de la visite, de la « Visitation ».

Les familles pauvres n’ont pas toujours les moyens d’exprimer par elles-mêmes ce qu’elles voudraient vivre en tant que famille. C’est pour cela qu’elles demandent à être visitées. Il y a nécessité à recevoir un étranger, un autre pour qu’il confirme par sa présence qu’on est encore bien une famille et qu’on fait bien partie de la même humanité.

La visite, c’est permettre à la famille de donner le meilleur d’elle-même. On pourrait prendre l’image de l’huître. C’est un corps étranger qui lui permet de secréter une perle. La visite permet de situer les contours de la famille. Franchir la porte, c’est créer un extérieur et un intérieur, une intimité. Alors bien sûr il y a des conditions à cette visite et la première de toutes, c’est l’envie d’apprendre humblement ce que la famille voudra bien partager, apprendre à recevoir ce qu’elle voudra bien donner. Cela exige du toupet et de l’humilité.

La quatrième exigence est celle de rassembler, de « remembrer » les familles en permettant la rencontre avec les enfants placés, de tisser les liens avec une plus grande famille qui se rassemble. « Le Sappel, c’est une grande famille. »

Notre expérience de ces temps de fraternité nous a amenés à privilégier quelques manières de faire :

– permettre à chaque famille d’avoir un temps ensemble de parole. Par exemple dans des journées familiales, chaque famille,parents et enfants, se retrouve pour vivre un temps fort de relations.

– Dans ces journées familiales ou nos autres rassemblements, il y a toujours des familles dites « partenaires » qui n’ont pas de rôle d’animation mais qui vivent ce qui est proposé à tous. Il est intéressant de constater comment certaines questions d’éducation deviennent légères quand elles se posent à tous les parents quelque soit le milieu.

– Dans ces moments de fraternité, il y a toujours une insistance sur l’art et sur l’expression artistique. Cela nous semble indispensable pour créer une intériorité à la fois familiale et personnelle.

– le dernier aspect que nous privilégions est le rapport au corps. La réalité ne se laisse pas enfermer dans des concepts, même si évidemment ils sont importants. La vie se dit, s’expérimente par le corps , les gestes, la danse, le repas. C’est parce que des corps, des cœurs et des intelligences se croisent, se rencontrent que le Royaume