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#10ansdeGénérosité - 10 lauréats du Prix de Recherche Caritas - 2013 - Olivier Peyroux

#10ansdeGénérosité - 10 lauréats du Prix de Recherche Caritas - 2013 - Olivier Peyroux

Créée sous l’égide de l’Institut de France, la Fondation de Recherche Caritas finance des recherches sur la précarité, la charité et la solidarité. Elle décerne, à l’occasion de son colloque annuel sur la pauvreté, le Prix de Recherche Caritas, doté de 10 000 euros, à un jeune chercheur en sciences sociales, pour épauler une recherche, une publication ou un projet de recherche innovant.

A l’occasion de ses 10 ans, la Fondation Caritas France vous propose de revenir sur le parcours des 10 lauréats du Prix Caritas.

Olivier Peyroux, la recherche en action contre les préjugés

Olivier Peyroux est le 4ème lauréat du Prix de recherche Caritas. A la différence de plusieurs récipiendaires, il n’est pas récompensé pour une thèse mais pour un travail atypique mené pendant 7 ans sur les mineurs en errance dans Paris. Le résultat de son travail, l’ouvrage « Délinquants et victimes : La traite des enfants d’Europe de l’Est en France », préfacé par R.Badinter jette une lumière crue et nouvelle sur un sujet éminemment politique quoique mal connu. 4 ans après son prix, il revient pour la Fondation Caritas sur son parcours, son travail et ses projets.

 

FCF – Comment vous est venue l’idée/l’envie, de conduire une recherche sur ce sujet ?  En quoi cela a-t’il impacté votre étude ?

OP – La décision même de mener ce travail est liée aux stituations de mineurs qui fréquentaient l’association Hors la Rue dont j’étais le directeur adjoint pendant 7 ans. Ayant eu précédemment une expérience professionnelle en Roumanie et dans les Balkans pendant 6 ans  j’ai mesuré le décalage entre ce que j’entendais dans des colloques, et les situations d’enfants exploités que je rencontrais. La méconnaissance de la situation de ces mineurs empêchait qu’une réponse en terme de protection de l’enfance leur soit donnée

Au niveau de l’approche scientifique, très rapidement, je me suis rendu compte qu’il fallait une approche pluri-disciplinaire. En effet, le sujet nécessite de mobiliser plusieurs champs disciplinaires. Cela vaut pour la sociologie bien sûr, mais aussi la linguistique, l’histoire de la  criminologie et la psychologie. Mon travail a surtout consisté en des recherches de terrain en allant régulièrement dans les villages ou les quartier d’origine de ces populations afin de rencontrer leur famille et de mieux identifier les processus d’asservissement.

 

FCF – Quelles sont les “découvertes” les plus marquantes que vous ayez faites ?

OP – D’une part dans la majoirté des situations la famille et/ou la belle-famille jouent un rôle. L’emprise psychologique sur les mineurs est de ce fait très profonde. Par ailleurs ce qui est perçu par nous comme un asservissement est régulièrment recodifié comme une forme de participation au prestige de la famille. Il y a donc une difficulté à travailler directement sur la reconnaissance par ces enfants de leur situation de victime. En revanche, tout un travail est amené pour modifier les modèles de réussite et les moyens pour y arriver. C’est surtout cet aspect qui permettra ou non une adhésion des victimes à une protection.

 

FCF – Qu’est-ce que le Prix Caritas a changé pour vous, à l’époque et aujourd’hui ?

OP – Le travail de recherche a été long et solitaire. Je suis passé par des phases de doutes tant sur la pertinence de ce travail que sur les réelles possibilités de le faire connaître. Le prix m’a conforté dans ma démarche tant sur le plan scientifique qu’en terme de visibilité. Sur le plan matériel comme j’avais démissionné pour réaliser cette étude, le soutien financier m’a été très utile. Mon objectif était d’écrire un livre pas une étude, j’avais donc contacté un premier éditeur qui a renoncé à la publication pour cause de changement de ligne éditoriale, le prix a aussi été un accélérateur pour en trouver un autre.

 

FCF – Pourquoi est-il important pour une fondation comme la Fondation Caritas France de s’intéresser à la recherche?

OP – Le  constat est que les universitaires qui étudient ces questions et les associations qui les traitent ont des vocables et des temps d’action différents.  Pourtant, un rapprochement n’a jamais été aussi nécessaire. Les phénomènes migratoires sont de plus en plus complexes et nécessitent une compréhension des stratégies mises en place avant de proposer des réponses.  Pour faciliter le travail des institutions et des associations comme le Secours catholique de s’inscrire dans ce dialogue permanent entre la recherche et l’action, avec un collègue nous avons créé l’association Trajectoires. L’objectif est d’analyser scientifiquement les raisons qui font que pour certains groupes l’accompagnement social proposé ne fonctionne pas et de proposer en partenariat des innovations sociales adaptées.

En second lieu, le prix n’a tout simplement pas d’équivalent en France que ce soit en termes de prestige ou de dotation financière. Il faut se rendre compte que cette dernière est importante pour un prix en sciences sociales. A vrai dire, je n’en connais pas d’autres de ce niveau.

Enfin, le prix est de plus en plus reconnu et nous recevons (en tant que membres du jury) chaque année davantage de travaux de grande qualité. Le Prix de recherche Caritas donne véritablement de la valeur aux travaux de sciences sociales qui s’inscrivent dans la compréhension de l’humain face à tous les enjeux contemporains.

 

Retrouvez le portrait de notre lauréate 2012 !