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Sébastien Kfoury - La Cloche

Sébastien Kfoury - La Cloche

Portrait Acteurs de Résilience

Sébastien Kfoury, Délégué général par intérim à La Cloche


FCF – Quel a été le projet porté par votre association dans le cadre du programme Acteurs de Résilience 2021-2023 ? Quels objectifs souhaitiez-vous atteindre ?

La Cloche permet de redonner un rôle aux citoyens dans la lutte contre la grande exclusion, notamment l’exclusion des personnes sans domicile. On a créé Le Carillon, un réseau de commerçants solidaires qui ouvrent leurs portes aux personnes sans domicile et qui leur proposent des services ou des produits gratuits : recharger son téléphone, avoir accès à un repas, avoir accès aux toilettes, au wifi, etc.

On redonne un rôle aux commerçants, mais aussi aux citoyens, en les outillant via du bénévolat, mais aussi en les formant et en changeant leur regard, via des campagnes de communication et de sensibilisation et des événements de lien social pour casser les clichés sur le monde de la rue. Finalement, on essaye de développer le pouvoir d’agir de chacun et de chacune. Le lien social c’est une chose pour lutter contre le rejet et l’isolement mais c’est un prétexte pour aller à la racine du problème en mettant les personnes sans domicile en position d’acteurs et d’actrices de leur réintégration dans la société. 

Quand on a démarré le programme, on était dans une phase de changement d’échelle à plusieurs niveaux. D’abord, un changement d’échelle en propre, en ouvrant de nouvelles antennes salariées sur de nouveaux territoires, mais aussi un changement d’échelle en franchise sociale, en outillant et en accompagnant des acteurs locaux dans le développement de notre méthode. Notre dernier objectif était de développer Le Carillon pour augmenter le nombre de commerçants et la qualité du réseau dans les villes déjà implantées, mais aussi de développer Le Carillon dans de nouvelles villes.

FCF – Qu’est-ce que le programme a changé pour votre association ? Et quel est votre souvenir le plus marquant concernant le programme ?

Le programme nous a apporté, notamment au début, un véritable coup de boost pour démarrer l’essaimage car on avait du mal à flécher des fonds spécifiquement sur ce volet. Ça nous a également permis de rencontrer des acteurs qu’on ne connaissait pas et d’apprendre de leurs propres modèles de développement. Et au-delà du soutien financier, la mise en valeur du projet par le soutien de la Fondation et la création de liens durables avec l’équipe sont des apports très précieux, notamment dans une posture de délégué général qui peut parfois être un peu solitaire. Le programme nous a permis de mettre en pratique une relation que l’on cherchait à avoir avec nos partenaires financiers, à savoir ne pas les considérer seulement comme des financeurs, mais comme des véritables partenaires qui nous accompagnent et qui travaillent avec nous.

La fin de l’année 2023 a été complexe pour La Cloche et l’engagement des équipes de la Fondation, leur soutien, leur attachement à faire le maximum pour débloquer tous les moyens possibles pour nous aider, c’est un très beau souvenir. On se rend compte que l’objectif de ce programme c’est vraiment d’accompagner, d’aider et d’être un soutien et pas seulement d’être un financeur porté sur des objectifs et des reportings.

FCF – Pourquoi est-il important, selon vous, que la Fondation Caritas France continue à proposer des programmes pluriannuels avec un soutien à la fois financier et extra-financier ?

On est sur des sujets qui sont complexes, interconnectés et profonds. L’approche qu’on doit avoir ne peut pas être linéaire et classique : on ne peut pas résoudre le problème de la grande exclusion et du sans-abrisme en un an grâce à un projet unique. Pour moi, il faut de fait que les acteurs financiers adaptent leurs façons de faire vers des approches systémiques. Plutôt qu’un soutien fléché au projet, c’est construire un mode de soutien basé sur la confiance en la capacité de l’association à s’adapter en fonction du contexte, c’est être dans des logiques d’apprentissage plutôt que de contrôle, c’est être dans un rôle de challenger mais de façon bienveillante. Et le soutien pluriannuel permet d’accepter le fait que le problème soit plus long, plus complexe, et ça permet de construire des relations durables avec les équipes qui pourront alors avoir un regard d’expert sur nos projets. Je pense que la Fondation Caritas, en tant que fondation abritante, doit être une tête de pont pour faire bouger la philanthropie, notamment familiale, en passant d’une philanthropie de l’affect à une philanthropie systémique pour financer des approches de changement systémique complexes avec des résultats plus incertains. Et je pense que des programmes comme Acteurs de Résilience sont de très bons outils pour cela.

 

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Sébastien Kfoury - La Cloche